c. Semaine du 21/12 au 27/12/2020 " Mademoiselle Caroline Rivière", Ingres

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    Jean-Auguste-Dominique INGRES (Montauban, 1780 - Paris, 1867)

    Mademoiselle Caroline Rivière (1793 - 1807)

     

    Ce portrait d'enfant ainsi que celui de ses parents démontrent l'intime parenté d'Ingres avec Raphaël et les Florentins, à la veille de son départ pour l'Italie. Lors de leur exposition au Salon de 1806, ils furent jugés "gothiques" en raison de leur précision linéaire et de leur matière émaillée de "primitifs".

    L'ambiguïté d'une adolescente

    De ce portrait à mi-corps d'une adolescente fluette, sur un fond de paysage d'Île-de-France, se dégage une grande fraîcheur. La jeune fille a un regard candide et une robe de mousseline blanche virginale. Mais une lèvre charnue, et des accessoires comme un boa d'hermine et des gants longs, sont évocateurs de la volupté d'une femme. Dans ce portrait d'enfant, le seul peint par Ingres, celui-ci a introduit la sensualité de ses portraits féminins.

    Un portraitiste malgré lui

    Ce portait de Mlle Rivière forme une manière de triptyque avec ceux de ses parents, également conservés au musée du Louvre. Ils ont été peints en 1806 à Paris, à la veille du départ d'Ingres, prix de Rome, pour la Ville éternelle. Ingres, qui se voulait peintre d'histoire, devait gagner sa vie en peignant des portraits, surtout à cette période de sa carrière. Ce portrait et celui de Mme Rivière ont été exposés au Salon de 1806 avec celui de Napoléon trônant (Paris, musée de l'Armée). La critique reprocha à Ingres d'être "gothique". On faisait un parallèle entre son style et celui des peintres primitifs, comme Van Eyck, que l'on découvrait à l'époque. Ingres, ulcéré par ces critiques, était toutefois prêt à devenir le "révolutionnaire" de l'art, comme il l'écrivait alors.

    Stylisation de la ligne

    La pose de la jeune fille évoque les portraits de Raphaël, un "dieu" pour Ingres. Mais les caractéristiques du dessin, laissant de côté l'exactitude anatomique, sont propres au jeune artiste novateur. Le cou de Caroline Rivière est très allongé, la ligne du nez se poursuit sans interruption sur l'arcade sourcilière et forme une courbe étrange. À l'opposé de l'abstraction des contours, le rendu de la texture des vêtements est illusionniste. Le coloris de ce portrait est également remarquable. La clarté générale du tableau est mise en valeur par le noir d'ébène de la chevelure et le jaune moutarde des gants.

     

    https://www.louvre.fr/oeuvre-notices/mademoiselle-caroline-riviere